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Exclusif: L’organisation WAITO, cheval blanc ou cheval de Troie ?


7 Février 2016

Forcing auprès du gouvernement tunisien de cette ONG étrangère pour assurer la traçabilité en Tunisie. L’initiative serait excellente si elle n‘était pas suspecte et si elle ne piétinait pas la souveraineté du pays. TS a investigué.


Exclusif: L’organisation WAITO, cheval blanc ou cheval de Troie ?
Le 23 novembre 2015, paraissait sur le site français « Contrefaçon-Riposte » un article sous la signature de Philippe Collier intitulé « Tunisie : WAITO mandatée pour concevoir l’Agence nationale contre les trafics illicites »(voir lien ci-dessous). On y lisait que, « Après une année de négociation le ministère des Finances tunisien, avec l’aval de l’Assemblée parlementaire, a confié, le 10 novembre dernier, à la World Anti-Illicit Traffic Organisation (WAITO) l’étude de faisabilité, la rédaction du cahier des charges et la configuration du texte de loi qui autorisera, dès 2016, la création de l’Agence nationale tunisienne contre les trafics illicites. Une première dans le monde… La jeune démocratie tunisienne est particulièrement vulnérable face à « l’arc de crise », qui s’étend du Sahara Occidental au chaos Libyen, en passant par la Mauritanie, le Mali, le Niger. Il règne dans cette zone un état de non-droit qui favorise les trafics illicites entre les mains des mafias et de l’islamo-banditisme ».

La WAITO côté cour

A priori, l’information semble anodine et l’initiative parait louable. Mais, en y creusant un peu, l’on découvre que les promoteurs de ce projet prennent les Tunisiens pour ce qu’ils ne sont pas, ou plutôt pour ce qu’ils sont depuis janvier 2011 ! C’est du même ordre que la Bible des droits-de-l’homme que le civilisé occidental est missionné d’enseigner aux sociétés primitives !
      
Cet article cite les propos d’un certain Pierre Delval, qui est le président-fondateur de WAITO et selon lequel, « il s’agit de concevoir et mettre en place une nouvelle structure administrative de coordination qui permette à l’État tunisien de reprendre la main face au développement anarchique des trafics illicites de marchandises (contrebande et contrefaçon) qui via le Sahel menace la stabilité, les recettes fiscales et l’ensemble de l’économie de la Tunisie ».

A l’auteur de l’article d’expliquer que, « Face à la porosité des 1 500 Km de frontière aux trafics illicites qui s’infiltrent entre la Tunisie et ses deux pays frontaliers (Algérie et Libye), l’économie tunisienne est prise en étau. D’une part, cette contrebande rend improductif tout investissement  commercial ou industriel formel. Les entrepreneurs et investisseurs potentiels sont découragés. D’autre part, cette contrebande fait perdre à l’État une part considérable de ses revenus. Aujourd’hui, le commerce sous-terrain dépasse plus de 50 % de l’économie nationale et près de 70 % de la population tunisienne devient indirectement complice de ces pratiques. La conception de cette Agence doit rapidement renouveler les concepts et les approches qui ont eu cours jusqu’à présent pour regagner en efficacité. Il s’agit en fait de la première initiative concrète d’une stratégie globale de prévention et de dissuasion contre les trafics illicites qui devrait à terme concerner l’ensemble du Maghreb, dont la stabilité est essentielle pour l’Europe ».

Jusqu’à là, rien de suspect ou de déplorable. Bien au contraire, tout semble amodiable et même utile pour assainir le tissu économique tunisien et assurer à une économie en berne depuis 2011 une reprise plus que vitale à la survie de larges couches sociales et à la stabilité du pays. Plus urgent et plus précieux encore, la traçabilité permet de combattre efficacement le terrorisme islamiste en asséchant ses sources d’autofinancement et en frappant là où ça fait mal. Le terroriste sanguinaire Mokhtar Belmokhtar alias « Le Borgne », n’a pas démérité de son autre surnom : « Mister Marlboro ». C’est dire l’ampleur du trafic de cigarettes dont il a le monopole sur une bonne partie du continent africain, outre le trafic des immigrés clandestins dont il profite bien depuis le séisme du « printemps arabe » que l’Europe a célébré et dont elle souffre des conséquences aujourd’hui. Le trafic de cigarettes rapporte au Borgne 1 milliard de dollars, outre l’investissement direct de certains Qataris ! Tout cet argent sert évidemment au financement d’Ansar al-Charia et de l’AQMI.

La WAITO côté jardin

Ce qui est d’abord dérangeant et offusquant dans cette affaire c’est que la traçabilité, qui permet de sécuriser l’échange et la vente de produits de marché soumis aux taxes, relève du domaine régalien de l’Etat et implique même sa souveraineté. C’est à l’Etat et à lui seul de concevoir et de réaliser sa stratégie de traçabilité.

Il a ainsi toute la latitude de ratifier les traités internationaux qui existent déjà, de soumettre au préalable ces ratifications au Parlement, de donner aux services de douane, ainsi qu’à la police et à l’armée tous les moyens moderne de combattre les trafics en tout genre… Et à supposer que la Tunisie manque de compétences en la matière, et qu’elle a besoin d’une expertise étrangère pour mener à bien son action, il faudrait alors dans ce cas lancer un appel d’offre et sélectionner l’entreprise ou l’ONG la plus compétente et transparente qui l’aiderait dans un tel chantier.

Or, comment ont manœuvré les chevaliers blancs de la WAITO (Word Anti Illicit Traffic Organisation)? Leur approche a commencé dès le 1er juin 2011, par la signature d’une convention avec le ministère des Finances concernant « l’adoption d’une politique préventive et répressive de lutte contre la contrefaçon ». Le 7 juin 2012, une rencontre a eu lieu à la Casbah entre Pierre Delval et Hamadi Jebali, en présence d’Abderrahmane Ladgham, ministre auprès du chef de gouvernement chargé de la gouvernance et de la lutte contre la corruption. Selon le communiqué du Premier ministère, cette rencontre « a permis de dynamiser la convention conclue en juin 2011 ».         
La WAITO a ensuite approché et « sensibilisé » deux hauts fonctionnaires du ministère des Finances, Mohamed Soufiene Chaouachi (ex chef de cabinet de Slim Chaker) et Saïd Kchida, en mandatant un jeune tunisien,  Imed Balti, qui serait en Tunisie l’homme de Pierre Delval, le président de la WAITO.

Ce trio s’est mis en relation avec Ridha Ben Mosbah, le conseiller économique de l’actuel chef du gouvernement qui a remplacé Ridha Saïdi lorsque Hamadi Jebali alias Hamma McCain était à la Casbah, il l’a approché pour qu’il fasse pression sur le ministre des Finances. Celui-ci avait bien pris note de la demande « philanthropique » de la WAITO et le dossier a fini par atterrir chez la Commission des Finances au sein de l’Assemblée Nationale, où l’on trouvera d’ailleurs la trace d’un PV. Selon nos informations, la Commission en question s’est opposée au fait que la WAITO soit chargée de ce projet de traçabilité, indiquant qu’il est tout à fait à la portée des compétences tunisiennes. Pour barrer la route aux affairistes, ces membres auraient même demandé au ministre des Finances, avant la plénière parlementaire, que ses services se chargent de préparer un texte de loi sur la traçabilité des produits alcoolisés, tabac, eau…(voir ci-dessous l’article 14, page 89 du Rapport de la Commission des Finances, de la Planification et du Développement relatif au projet de loi des Finances 2016). 
    
A quoi joue la Commission des Finances ?

Or, qu’est-ce qu’on apprend dans l’article de Contrefaçon-Riposte cité plus haut ? On y apprend que, « Après une année de négociation le ministère des Finances tunisien, avec l’aval de l’Assemblée parlementaire, a confié, le 10 novembre dernier, à la World Anti-Illicit Traffic Organisation (WAITO) l’étude de faisabilité, la rédaction du cahier des charges et la configuration du texte de loi qui autorisera, dès 2016, la création de l’Agence nationale tunisienne contre les trafics illicites ».

Si cette information est avérée, l’on se demanderai alors à quoi joue la Commission des Finances au sein de l’Assemblée Nationale ! Toute la question est de savoir maintenant si cette Commission, qui est présidée par Iyed Dahmani et dont l’ex vice-président Mohsen Hassen (UPL) est devenu depuis ministre du Commerce, va tenir tête au lobbying étranger et résister aux pressions, notamment d’Ennahdha. La question est de savoir si elle va se saisir sérieusement de ce dossier pour travailler sur un texte de loi qui pourrait éventuellement s’inspirer de l’expérience marocaine depuis 2010. Ou si elle va faire preuve de nonchalance en se déchargeant d’un travail de proposition, de veille et de surveillance qui répond normalement à sa vocation ?  Ou encore si elle va se contenter de cautionner implicitement, ou sous la pression de certains lobby, la WAITO et avaliser sa proposition d’écriture d’un cahier des charges et même la rédaction du texte de loi de question ?

Cette vénérable Commission des Finances, qui englobe des élus de Nidaa Tounes, d’Ennahdha, du Front Populaire, d’Afek Tounes et de l’ULP, est-elle si démunie en compétences et experts pour autoriser une ONG étrangère de s’immiscer dans un domaine si stratégique ? Le ministère des Finances, qui dispose du meilleur service juridique de toute l’Afrique du Nord, est-il incapable de produire un tel texte de loi sans expertise étrangère et sans même se référer à l’expérience marocaine ? Est-il besoin de rappeler que la traçabilité implique des enjeux économiques, financiers, fiscaux, sécuritaires et politiques majeurs ?  
  
C’est que pour nous, la WAITO n’est pas aussi claire qu’on pourrait le supposer. Son président, Pierre Delval, certes grand criminologue et criminaliste français, spécialiste en matière de contrefaçon et de crime-contrefaçon, est aussi conseiller d’un grand groupe international et il est un proche de A.B, lui aussi éminent criminologue et puissant homme de réseau et d’influence en France ! Seul hic, la WAITO, supposée basée à Washington, n’a pas d’adresse physique de bureau. Mieux encore, cette ONG, qui dit avoir des relations de partenariat avec l’OCDE, n‘en aurait aucune institutionnellement. Elle serait plutôt une association qui vend ses prestations et services aux pays ou organismes qui en ont besoin. Son but n’est donc pas philanthropique, encore moins « humanitaire » mais financier.

A supposer que la Tunisie en ait besoin, il n’y aurait aucun inconvénient à ce que notre pays profite de l’expertise de la WAITO, encore faut-il que celle-ci évite les raccourcis et détours, et invite surtout ses éventuels partenaires tunisiens, qu’ils soient hauts fonctionnaires des Finances, ou députés ou politiques, à respecter rigoureusement les lois en vigueur et les procédures légales, à commencer par les appels d’offre. En d’autres termes, bienvenue à la WAITO en tant que cheval blanc, mais pas comme cheval de Troie !!! 
 
Lilia Ben Rejeb

A lire aussi l’article publié le 23 novembre 2015 par Contrefaçon-Riposte :                                              
http://www.contrefacon-riposte.info/international/4929-tunisie-waito-mandatee-pour-concevoir-l-agence-nationale-contre-les-trafics-illicites

Rapport final de la Commission des Finances, de la Planification et du Développement au sein du Parlement, tiré du site de l’ARP :

http://www.arp.tn/site/servlet/Fichier?code_obj=91539&code_exp=1&langue=1


           

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