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Les Tunisiens ont le choix entre la réconciliation nationale et la débâcle grecque


24 Juillet 2015

Analyse percutante de l'initiative présidentielle de réconciliation nationale que beaucoup souhaitent et que certains redoutent par populisme et manœuvres bassement politiciennes. A la fois acteur politique et grand industriel, Mohamed Ayachi Ajroudi n'aborde pas cette question d'un point de vue moral, ni d'ailleurs strictement politique, mais sous l'angle du pragmatisme économique et de l'utilité sociale. C'est que pour lui, l'économique doit être au service du social et au secours du politique.


Les Tunisiens ont le choix entre la réconciliation nationale et la débâcle grecque
Quelques réactions négatives suscitées par l’initiative du Président de la République relative à la réconciliation économique et financière laissent la personne perplexe et montrent le degré de surenchère politique auquel le pays est arrivé et la manipulation dont est devenu l’objet le Tunisien et en particulier celui appartenant à la classe moyenne, à plus forte raison la catégorie des pauvres. Heureusement que la dure réalité que vit le Tunisien depuis 2011, une réalité faite désormais de peur, de manque de confiance, de chômage, de pauvreté et d’érosion du pouvoir d’achat, ramène le tunisien à la raison et lui permet désormais de discerner entre discours responsable et propagande populiste, entre la manœuvre politicienne de bas niveau et l’engagement résolu du coté du citoyen tunisien, en cherchant à résoudre ses vrais problèmes, ceux du chômage, de la pauvreté et de l’exclusion sociale.

Cauchemar grec et rêve suisse

Aujourd’hui la question se pose en des termes on ne peut plus clairs : il s’agit de choisir entre une réconciliation économique à même de remettre le pays en marche de manière à s’attaquer aux problèmes fondamentaux du pays, et la fuite en avant avec en perspective la pathologie grecque, un scénario où la Tunisie perdrait l’initiative pour ne pas dire sa souveraineté (ou ce qui en reste) et serait amenée à appliquer des mesures douloureuses d’austérité similaires à celles assignées à la Grèce. Il faudrait d’ailleurs avoir l’honnêteté intellectuelle de reconnaître qu’en 2010, en dépit de tout ce qui a été raconté sur l’économie tunisienne, celle-ci était nettement plus saine et plus performante que l’économie grecque, portugaise et même espagnole, pour ne citer que des pays européens. Avec seulement 5% de ce qui a été injecté par l’Union européenne dans l’économie grecque depuis 2011, et avec une équipe gouvernementale autre que celles des amateurs et des imposteurs qui se sont relayés ces quatre dernières années, la Tunisie serait aujourd’hui, effectivement, la Suisse de monde arabe.   

Durant les quatre dernières années la situation économique et financière du pays s’est sensiblement dégradée : une croissance économique moyenne qui ne dépasse pas 1.5% soit un peu plus que la croissance démographique contre 4.5% en moyenne durant les vingt dernières années 1990-2010, des fondamentaux déséquilibrés avec des déficits budgétaires de 7 à 8% et des déficits de paiements extérieurs courants de 8 à 10%, du jamais vu en Tunisie, une dette publique qui a augmenté de façon vertigineuse jusqu’à atteindre 56% du PIB contre moins de 40% quatre ans auparavant.

La situation devient explosive avec les informations disponibles pour 2015 : un secteur touristique à plat, une récolte de céréales qui baisse de 40%, un secteur minier qui tarde à redémarrer ; en réalité quasiment tous les secteurs battent de l’aile et la croissance risque même d’être négative pour 2015. Quand on ajoute à cela les remboursements que le pays aura à faire en 2016 et 2017 et surtout l’approche des échéances de remboursement des prêts contractés au cours des quatre dernières années auprès du FMI , de la Banque mondiale et de la BAD .C’est automatiquement le spectre de la GRECE qui se dessine devant nous avec l’appui de l’Europe en moins. Il est vrai que le taux d’endettement officiellement déclarée ( 52% du PIB) reste plus bas que celui de la Grèce , mais il faut savoir que si on y ajoute la dette des entreprises publiques et les déficits de la sécurité sociale ce taux est beaucoup plus élevée ( 70 à 75%) ; par ailleurs le volume de la dette augmente très vite et augmentera rapidement au cours des prochaines années avec les engagements futures des entreprises publiques et du système de sécurité sociale outre les besoins sans cesse croissants de l’Etat . En fait avec la rareté des ressources internes due à l’atonie de la croissance on est déjà arrivé à un stade grave où il faut s’endetter pour rembourser, une dangereuse spirale qui ne peut être rompue que si la machine économique redémarre.

Diabolisation de l’ancien régime et exclusion des élites nationales

Cette situation est certainement due à la politique économique et financière désastreuse qui a prévalu durant les quatre dernières années , mais elle est également due à l’exclusion du circuit économique d’importantes capacités productives et à l’écartement du circuit de décision économique et financière de plusieurs compétences qui ont fait leur preuve au moment où le pays a traversé des crises économiques ou financières graves comme ce fut le cas au milieu des années quatre vingt, ou au moment de la crise du golfe ou encore plus récemment en 2007-2008 lors de la crise financière internationale. Le chiffre de 40% du potentiel du secteur privé avancé par la Banque Mondiale en tant qu’indicateur du poids des entreprises qui ont fait l’objet d’expropriation, bien qu’il soit gonflé, a été utilisé dans un seul sens, celui de montrer l’ampleur du phénomène appelé «fassaad » (corruption) et pour diaboliser l’ancien régime. Avec la façon dont ces entreprises ont été gérées, on en arrive à exclure ces entreprises du circuit productif. Sur la base des données de la Banque Mondiale, le pays aurait perdu en cinq ans 8 à 10 points de croissance soit environ 6 à 8 milliards de dinars.

Par ailleurs les hommes d’affaires interdits de voyage n’ont pu gérer convenablement leurs entreprises et ont vu leur contribution aux exportations et à la croissance sensiblement baisser. Enfin, même les hommes d’affaires qui ne font pas l’objet de poursuites judiciaires ont suspendu tout investissement de peur d’être à leur tour l’objet de mesures d’expropriation ou de poursuites judiciaires aussi arbitraires qu’inutiles. Beaucoup d’entre eux ont d’ailleurs quitté le pays et se sont installés professionnellement au Maroc, en Algérie ou ailleurs, notamment en Europe. On constate également un départ massif de nos médecins, ingénieurs, informaticiens, experts financiers… vers l’Europe, le Moyen-Orient et l’Amérique du Nord. 

Deuxième conséquence majeure des procès engagés contre les fonctionnaires ou assimilés, l’état d’irresponsabilité dans lequel se trouve des pans entiers de l’économie et la réticence des cadres concernés par ces procès à prendre des initiatives ou même à assumer convenablement les missions pour lesquelles ils sont payés ; les cadres de l’Administration, des banques, et des entreprises publiques ne veulent plus prendre les décisions de peur d’être l’objet de poursuites judiciaires. Le cas de cette banque bloquée dont la direction des crédits ne fait que répondre aux interrogations de la justice est éloquent ainsi d’ailleurs que le cas de la direction générale de l’énergie après cette campagne « Winou el pétrole » (où est le pétrole), qui relève de la mauvaise foi manifeste et de la pure propagande populiste.

Dans un tel climat, il est inutile de penser investissement, croissance ou emploi. En effet, quel homme d’affaire tunisien ou étranger s’engagerait dans des investissements aussi risqués dans un pays secoué par le terrorisme et qui de surcroit dispose de peu de matières premières et dont le coût de la main d’œuvre ne cesse d’augmenter sous la pression des revendications syndicales tout azimut au delà du problème de l’exiguïté du marché local qui constitue un véritable goulot d’étranglement à la croissance et au développement du pays.

Justice transitionnelle et redressement économique

L’initiative de réconciliation économique et financière adoptée par le gouvernement est une initiative salutaire et équilibrée qui maintient le cap sur une justice transitionnelle à l’instar des pays qui ont connu des expériences similaires et apporte des solutions concrètes à même de renforcer la confiance des opérateurs économiques et de remettre dans le circuit économique un potentiel exclu depuis plus que quatre ans au point que ce capital « entreprise et entreprenariat » risque d’être définitivement perdu.

En effet, l’initiative ne touche que les infractions économiques ou financières, les crimes de sang de torture ou ayant trait aux droits de l’homme restent du ressort de la commission « Vérité et Dignité » qui disposera du temps nécessaire pour traiter ces dossiers avec la profondeur requise. Les dossiers ayant trait aux domaines économiques et financiers seront traités dans un cadre qui assure la célérité qu’exige la situation économique désastreuse du pays et la nature des fautes commises. Bien évidemment, ce nouveau cadre exclut les crimes de corruption ou de détournement de fonds publics à des fins propres qui resteront du ressort de la Justice; les autres infractions relèveront d’un traitement particulier qui prend en compte les intérêts du pays et le respect de sa législation. Comme le précise la loi, trois catégories seront concernées par cette initiative :

-les fonctionnaires ou assimilés, qui n’ont pas fait de détournement de fonds et qui n’ont pas été l’objet d’actes de corruption, bénéficieront d’un arrêt des poursuites judiciaires, les actes qu’ils ont commis relevant le plus souvent de l’application de consignes ou d’instructions de leurs supérieurs hiérarchiques. Ce n’est d’ailleurs que justice rendue compte tenu du fait que l’article 42 du code pénal précise que les fonctionnaires qui obéissent à des ordres de leurs supérieurs hiérarchiques ne sont pas passibles de sanctions.

-les autres catégories et en particulier les hommes d’affaires qui ont commis des crimes économiques et financiers pour lesquels une procédure de transaction est prévue sur la base de la formulation d’une demande et d’une investigation faite par une commission pluridisciplinaire qui relève du chef du gouvernement et qui regroupe en son sein deux membres de la commission Vérité et Dignité, signe que le projet ne vise pas à décharger ladite commission de ce dossier, mais de mettre en place une procédure rapide à même de faire réintégrer dans le circuit économique les forces productives du pays et ce avec la contribution au sein de cette commission de deux des membres du comité Vérité et Dignité qui feront partie intégrante du nouveau dispositif.

-les détenteurs de capitaux à l’étranger qui pourront bénéficier d’une amnistie de change au cas ou ils rapatrient leurs ressources en devises dont ils disposent à l’étranger à l’instar de l’opération menée récemment par le Maroc et qui a rapporté pour ce pays 2 milliards de dinars en devises. Une telle initiative est incontournable si on veut tempérer un tant soit peu l’impact négatif de la débâcle du secteur touristique et la baisse sévère attendue des recettes en devises. Bien menée, une telle initiative peut rapporter 0,5 à 1 milliard de dinars et pourra remplacer entre 30 et 50 % de la moins value attendue pour le secteur touristique.

De la constitutionnalité de l’initiative présidentielle

Contrairement à ce que prétendent certaines personnes, cette initiative est loin d’être anti constitutionnelle. Elle respecte la hiérarchie des lois telle que définie par la nouvelle constitution. La constitution a instauré le principe de la Justice transitionnelle ( et non la commission Vérité et Dignité) et une loi fondamentale a défini le contenu de cette réconciliation avec ses volets droits de l’homme et sa dimension économique et financière et a en même temps crée la commission « Dignité et Vérité » ; la nouvelle initiative revêt la forme d’une loi fondamentale, ce qui est conforme à la hiérarchie des lois ; la nouvelle initiative du Président de la République a laissé les questions de justice transitionnelle ayant trait aux droits de l’homme du ressort de la commission « Vérité et Dignité » comme cela a été le cas dans la plupart des pays qui ont connu des expériences similaires de justice transitionnelle et a défini une procédure spéciale de traitement des questions économiques et financières et la procédure est conforme à la constitution. Le Président de la République élu au suffrage universel est habilité à proposer des lois à la Chambre comme le prévoit la nouvelle constitution. Par ailleurs, le passage de cette loi par le conseil des ministres montre qu’il s’agit également d’une initiative du gouvernement, qui est lui aussi habilité à soumettre des lois à la Chambre. Forte du soutien de deux institutions Républicaines et des partis au pouvoir responsables et conscients des enjeux à venir, cette initiative devra aller dans le sens des intérêts supérieurs du pays et aussi dans l’intérêt bien compris du peuple.

Ce bon peuple, précisément, en a assez des démagogues et des opportunistes qui parlent en son nom et agissent contre ses intérêts. L’heure n’est plus à la surenchère populiste et aux promesses fumeuses. Comme je l’ai précédemment écrit ici-même au sujet de l’UGTT et de certains partis ou personnalités qui doivent passer du verbe haut au profil bas, eu égard à leur responsabilité écrasante dans l’abaissement économique de la Tunisie, il est grand temps de retrousser les manches et de se remettre au travail. Le pays ne se relèvera pas sans une prise de conscience collective et une mobilisation générale de toutes les forces vives de la Nation, à commencer par celles qui ont été arbitrairement exclues sous le prétexte fallacieux du « Al-Chaab Yourid » (Le peuple exige).

Mohamed Ayachi Ajroudi 


           


1.Posté par farhat SAIDI le 25/07/2015 08:07
La réconciliation nationale trouble l'ordre Public et ce n'est nullement une bande de voyous qui l'imposeront au Peuple Tunisien.
La société Tunisienne n'est pas prête de passer l'éponge,
Les malversations et l'abus de pouvoir ont implanté le doute et la méfiance dans les veines des Tunisiens. Donc, ceux qui chantent pour la réconciliation nationale sont redevables et instables dans leurs esprits...
1) Qui remboursera le Peuple ????????????
2) Qui dénoncera l'abus de pouvoir exercé pendant le règne de la "TROIKA" ????????
3) Où se trouve l'argent Public et chez qui ???????????
4) L'idée de réconciliation nationale donne l'envie de vomir et procure le dégout de la politique .
Alors en conclusion:
Cherchez d'autres moyens pour remettre le Pays sur les rails et occupez-vous d'autres choses pour améliorer la vie des citoyens et surtout le plus démunis; Et gommer cette fausse idée de vos têtes parce que vous êtes redevables à la société Tunisienne.
farhat

2.Posté par Khaled Bouzgarrou le 25/07/2015 10:36
Monsieur Ayachi depuis que je vous ai découvert sur tunisieSecret j'ai beaucoup de respect pour vous car vous ête un patriote et votre discour n'est pas comme celui des autres politiciens. Mais ici je ne suis pas vraiment d'accord avec vous. Les corrompus de l'ancien régime doivent rendre l'argent, Slim Chiboub, Sakr Materi, Belhassan Trabelsi, Marwan Mabrouk,...Les mafieux du régime suivant eux aussi, Hamadi Jebali, Mahdi Jomaa, Karboul, Houas, Ben Salem, Hamiden, Sihem Badi, Sihem bensedrine, Abbou,...Pas de pardon avec ces gens.

3.Posté par Basma Yacoub le 25/07/2015 10:45
Grand BRAVO monsieur. Si on veut sauver notre pays la réconciliation nationale est nécessaire. C'est très juste de votre part de considérer que c'est pas une question morale mais purement économique. Les manipulateurs et les menteurs ont assez fait de mal comme ça. Il y a eux qui cherchent la vengeance et les réglements de comptes et il y a les vrais nationalistes qui cherchent à remettre la Tunisie en marche. Merci monsieur Mohamed Ajroudi de dire les choses sans hypocrisie et avec comme seul motif le BIEN de notre pauvre pays. B.Y

4.Posté par Tarek Khalfaoui le 25/07/2015 10:52
D'accord à 100%. Les anciennes hautes compétences qui ont fait de la Tunisie ce qu'elle a été doivent revenir. Les tunisiens ont compris la différence entre les Anciens et les Nouveaux. Si votre analyse n'est pas suivie, le peuple va bientôt fouiller dans les poubelles pour manger, et encore ?

5.Posté par Mohamed Zrafi le 25/07/2015 10:56
Parfois je me dis qu'il faudrait peut être aller au bout de la catastrophe pour que ces gens comprennent l'ampleur du problème. #ما_يعرفوه_بقري_كان_بالكرشة #لعلهم_يعقلون

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