Tunisie : Racisme et « patriotisme » footballistique, par Aliou Fama


3 Février 2015

La défaite de l’équipe nationale face à la Guinée Equatoriale a révélé combien certains Tunisiens sont petits, mesquins, indignes et racistes. Leur colère et leur « patriotisme », ils ne l’ont pas manifesté lorsque les mercenaires du Qatar les ont gouvernés, ou lorsque leurs soldats se font égorger. Ce fut pour eux un grand malheur, une tragédie nationale que de perdre ce match de foot à cause d’un arbitre corrompu. Depuis leur révolution du jasmin, ils sont pourtant bien placés pour savoir que tout s’achète et se vend ! Etait-ce une raison pour s’en prendre aux Africains qui vivent en Tunisie ? Pour sauver leur honneur perdu bien avant cette partie de foot, ils ont déversé sur internet leur racisme anti-noir ; ils ont agressé et volé de pauvres étudiants qui n’ont rien de commun avec les Guinéens que la couleur de leur peau. La religion est l’opium des peuples disait Marx. Dans notre cas, à la religion, s’ajoute le poison du football, qui touche indistinctement la populace comme « l’élite ». On rappellera ici que la Banque Africaine a été le partenaire financier No1 de la Tunisie depuis l'indépendance, et que depuis la "révolution du jasmin", c'est cette banque qui assure le paiement des salaires des soldats et officiers de l'armée tunisienne !


Le racisme anti-noir s’est une nouvelle fois manifesté sous sa forme la plus abjecte après le match Tunisie-Guinée Equatoriale. Dans la nuit du samedi au dimanche 1er février, les agressions qui visent la communauté sub-saharienne se sont multipliées dans l’impunité.

L’Association des Etudiants et Stagiaires Africains en Tunisie (Aesat) a passé le mot : «En raison de cas de bagarres et d’agressions recensés suite au Match qui opposa la Tunisie et la Guinée Équatoriale et dans un souci de sécurité, nous demandons à tous les communautaires de rester chez eux dans la nuit du Samedi au Dimanche 1er Février».

Un appel à la prudence lancé suite à la vague d’agression qu’ont vécue les membres de la communauté sub-saharienne en Tunisie suite à un malheureux match de foot aux conséquences dramatiques.

Le journaliste Thameur Mekki a pour sa part dénoncé des «agressions des noirs après le match à Borj Louzir, où réside une importante communauté estudiantine subsaharienne (Gabonais, Congolais, Sénégalais…). Dès la sortie du café à Cité Santé, un groupe de plus de 10 tunisiens a gravement tabassé un jeune noir.

Un autre a été cambriolé après avoir été agressé par un autre groupe. Ses agresseurs se sont bagarrés ensuite entre eux après un conflit sur le partage du butin (qui prendra son ordi ?). Les quelques Tunisiens qui se sont interposés ont eux aussi été agressés». M. Mekki conclut ainsi son témoignage : «La facette la plus lâche, la plus idiote et la plus ignoble de notre société se manifeste».

Les langues se délient sur les réseaux sociaux. Amel Smaoui Zampol dénonce un autre cas d’agression, et décrit le tabassage d’un jeune noir devant un café dans le quartier de l’Aouina. Dans la même nuit du samedi, un jeune informaticien Congolais affirme n’avoir trouvé son salut qu’en prenant la fuite face à ses assaillants. On relèvera que pour les agresseurs, peu importe la nationalité de leurs victimes.

La couleur de peau suffit pour les désigner comme cible. Car quel point commun peuvent avoir un équato-guinéen avec un congolais au-delà de leur peau noire ? Alassanne, un jeune Ivoirien ne décolère pas : «J’ai soutenu l’équipe tunisienne. Et à la sortie de ce café, on a voulu me dépouiller. Et je ne suis pas équato-guinéen ! Est-ce qu’on attaquerait des Italiens pour un problème avec les finlandais ?!!».

Entretemps, de nombreux propos ouvertement racistes, haineux, et assumés comme tels, se multiplient et sont publiés à visage découvert, dans la plus totale des impunités sur les réseaux sociaux. Et si l’occasion de ce match sous haute tension a fait éclater les manifestations du racisme le plus abject, on ne compte plus les cas d’agressions et de discriminations qui visent explicitement les membres des communautés originaires de pays subsahariens.

Alassane martèle : «Noirs, arabes, et basanés, nous sommes parqués comme des bêtes dans les camps de la forteresse européenne, à Lampedusa. Nous nous écrasons sur les mêmes barbelés dressés par l’Espagne à Melilla, dans une Afrique encore en partie occupée. Les ratonnades françaises ont frappé indifféremment Noirs et Arabes dans les banlieues parisiennes.

Et voici que des Africains du Nord s’en prennent à nous, juste parce que nous sommes nés au sud du Sahara. Je pensais qu’en Tunisie, nous serions à l’abri de telles vexations. Et voici que nous sommes aujourd’hui confrontés à la haine et à l’incompréhension, ici-même, sur cette terre africaine».

Aliou Fama, dans senego.com

Communiqué du gouvernement équato-guinéen publié le 2 février 2015 :

« Nous allons donner raison aux journaux tunisiens lorsqu’ils parlent de « honte », mais c’est leur sélection qui devrait avoir honte, car, d’après le ranking (classement) de la Fifa, elle occupe la 22e place et a perdu contre la Guinée équatoriale, qui occupe la 118e place. Etant donné cette différence, elle aurait dû gagner 4-0 et ne pas pleurer pour un penalty douteux, y est-il expliqué. Nous leur donnons raison lorsqu’ils parlent de « scandale », mais ce sont leurs joueurs qui ont provoqué le scandale avec leur comportement peu digne de celui de sportifs, qui se sont même mis sur le banc du Nzalang pour insulter et cracher sur les membres de notre sélection, qui ont poursuivi l’arbitre pour l’agresser et qui sont sortis du terrain de jeu en insultant et en faisant des gestes obscènes aux supporters. »