En réplique à l’insolence de Tom Malinowski, secrétaire d’Etat adjoint américain, chargé de la démocratie, des droits de l’homme et du travail, le ministère bahreïni des Affaires étrangères l’a jugé, lundi 7 juillet 2014, « persona non grata », en lui demandant de « quitter immédiatement » le pays.
Les autorités bahreïnies ont dénoncé le fait que Tom Malinowski se soit « ingéré dans les affaires intérieures de Bahreïn » en rencontrant « un parti en particulier au détriment d'autres interlocuteurs », selon un communiqué publié par l'agence BNA. Le parti en question est Al-Wafek, qui représente l’opposition chiite.
Sûre de son bon droit de s’immiscer dans les affaires intérieures du Bahreïn, sous le prétexte habituel des droits de l’homme, la porte-parole du Département d’Etat américain, Jen Psaki, a répliqué que Tom Malinowski « est à Bahreïn et reste à Bahreïn », ajoutant qu’il est « en visite pour affirmer et renforcer les liens bilatéraux, et soutenir les efforts de réformes du roi » !
Qu’importe si la déclaration du Bahreïn, qui abrite pourtant le quartier général de la cinquième flotte américaine, ait été suivie d’effet ou non. La morale ici est dans l’audace diplomatique d’un minuscule émirat, qui s’est senti offensé par l’attitude pour le moins arrogante d’un haut responsable américain, venu enseigner aux « bédouins » ce qu’est la « civilisation ».
Ce qui est offensant pour un Bahreïni est jugé « normal » pour un Tunisien, qui se croit pourtant supérieur à ces gens du Golfe et même à ses voisins Maghrébins, par son « Histoire », par sa « culture », par sa « fierté » et par sa « dignité » ! C’est ce complexe de supériorité et cette fierté illusoire et trompeuse qui sont au cœur de la tragédie tunisienne. C’est sur ce complexe que certains médias occidentaux ont joué pour flatter l’égo tunisien, l’hypertrophier et le galvaniser en vue de provoquer la « révolution » bouazizienne, propédeutique à une destruction programmatique du monde arabe.
Dans ce pays tombé plus bas que terre et entrainant dans sa chute trois Etats arabes, c’est le Proconsul Jacob Walles qui gouverne, à l'instar de Paul Bremer, après l’invasion de l’Irak par la soldatesque anglo-américaine. Tous le savent et nul n’a le courage ou la dignité de le dénoncer, pas même de s’en offusquer. Ni cette nouvelle classe politique toute tendance confondue, ni les syndicalistes, ni les intellectuels, ni les nouveaux journalistes. C’est « normal », un mot français que le Tunisien sait braire, y compris lorsqu’il s’agit des anomalies les plus choquantes et les plus répugnantes : les morts qu’on compte dans les rangs de notre armée, les canailles de l’ANC qui s’accrochent à leurs sièges usurpés, les racailles intégristes qui diffusent dans les mosquées et à la télévision des discours moyenâgeux, les poubelles à ciel ouvert, les incivilités dans les rues et dans les lieux publics, les burkas, les barbes et les kamis talibans…
Il y a pourtant trois ans, rien de tout cela n’était « normal » au pays de Bourguiba, à plus forte raison le statut proconsulaire de Jacob Walles. Selon un cable datant de 2008 et publié par Wikileaks en 2010, ses prédécesseurs, Robert F. Godec et Gordon Gray, se plaignaient d’attendre six mois avant d’obtenir un rendez-vous avec le ministre tunisien des Affaires étrangères ! En 23 ans de pouvoir, le président Ben Ali a reçu huit fois l’ambassadeur des Etats-Unis, c’est-à-dire au moment de la présentation de ses lettres de créances. Depuis la « révolution du jasmin », le président de la République provisoire, le président de l’ANC, le chef du gouvernement dit de technocrates, les chefs de partis, de l’extrême-droite islamiste à l’extrême-gauche « progressiste », les dirigeants d’ONG, les syndicalistes, les patrons d’entreprises, les intellectuels supposés leaders d’opinion, les jeunes comme les vieillards…tous sont à l’affût du moindre rendez-vous, ou de la moindre et furtive apparition de son Excellence le Pronconsul des Etats-Unis en Tunisie.
Même s’ils ont fait preuve de discrétion cette foi-ci, et que les photos et les vidéos ont été déconseillées aux convives « pour préserver leur image », on les a tous vu en émotion à l’occasion de la fête nationale américaine, le 4 juillet dernier. Ils étaient tous attentif et admiratif devant le Proconsul Jacob Walles, lisant son discours à la gloire de la jeune et unique « démocratie dans le monde arabe » !
La date du 20 mars 1956 n’est plus qu’un lointain souvenir et la cérémonie de l’indépendance n’attire plus autant de monde et ne provoque plus autant d’émotion. « Normal », dans un pays qui a changé de normes, de valeurs et de symboles… et où l’inégalable Bourguiba a été mis en concurrence avec l’ineffable Bouazizi.
Mezri Haddad
Les autorités bahreïnies ont dénoncé le fait que Tom Malinowski se soit « ingéré dans les affaires intérieures de Bahreïn » en rencontrant « un parti en particulier au détriment d'autres interlocuteurs », selon un communiqué publié par l'agence BNA. Le parti en question est Al-Wafek, qui représente l’opposition chiite.
Sûre de son bon droit de s’immiscer dans les affaires intérieures du Bahreïn, sous le prétexte habituel des droits de l’homme, la porte-parole du Département d’Etat américain, Jen Psaki, a répliqué que Tom Malinowski « est à Bahreïn et reste à Bahreïn », ajoutant qu’il est « en visite pour affirmer et renforcer les liens bilatéraux, et soutenir les efforts de réformes du roi » !
Qu’importe si la déclaration du Bahreïn, qui abrite pourtant le quartier général de la cinquième flotte américaine, ait été suivie d’effet ou non. La morale ici est dans l’audace diplomatique d’un minuscule émirat, qui s’est senti offensé par l’attitude pour le moins arrogante d’un haut responsable américain, venu enseigner aux « bédouins » ce qu’est la « civilisation ».
Ce qui est offensant pour un Bahreïni est jugé « normal » pour un Tunisien, qui se croit pourtant supérieur à ces gens du Golfe et même à ses voisins Maghrébins, par son « Histoire », par sa « culture », par sa « fierté » et par sa « dignité » ! C’est ce complexe de supériorité et cette fierté illusoire et trompeuse qui sont au cœur de la tragédie tunisienne. C’est sur ce complexe que certains médias occidentaux ont joué pour flatter l’égo tunisien, l’hypertrophier et le galvaniser en vue de provoquer la « révolution » bouazizienne, propédeutique à une destruction programmatique du monde arabe.
Dans ce pays tombé plus bas que terre et entrainant dans sa chute trois Etats arabes, c’est le Proconsul Jacob Walles qui gouverne, à l'instar de Paul Bremer, après l’invasion de l’Irak par la soldatesque anglo-américaine. Tous le savent et nul n’a le courage ou la dignité de le dénoncer, pas même de s’en offusquer. Ni cette nouvelle classe politique toute tendance confondue, ni les syndicalistes, ni les intellectuels, ni les nouveaux journalistes. C’est « normal », un mot français que le Tunisien sait braire, y compris lorsqu’il s’agit des anomalies les plus choquantes et les plus répugnantes : les morts qu’on compte dans les rangs de notre armée, les canailles de l’ANC qui s’accrochent à leurs sièges usurpés, les racailles intégristes qui diffusent dans les mosquées et à la télévision des discours moyenâgeux, les poubelles à ciel ouvert, les incivilités dans les rues et dans les lieux publics, les burkas, les barbes et les kamis talibans…
Il y a pourtant trois ans, rien de tout cela n’était « normal » au pays de Bourguiba, à plus forte raison le statut proconsulaire de Jacob Walles. Selon un cable datant de 2008 et publié par Wikileaks en 2010, ses prédécesseurs, Robert F. Godec et Gordon Gray, se plaignaient d’attendre six mois avant d’obtenir un rendez-vous avec le ministre tunisien des Affaires étrangères ! En 23 ans de pouvoir, le président Ben Ali a reçu huit fois l’ambassadeur des Etats-Unis, c’est-à-dire au moment de la présentation de ses lettres de créances. Depuis la « révolution du jasmin », le président de la République provisoire, le président de l’ANC, le chef du gouvernement dit de technocrates, les chefs de partis, de l’extrême-droite islamiste à l’extrême-gauche « progressiste », les dirigeants d’ONG, les syndicalistes, les patrons d’entreprises, les intellectuels supposés leaders d’opinion, les jeunes comme les vieillards…tous sont à l’affût du moindre rendez-vous, ou de la moindre et furtive apparition de son Excellence le Pronconsul des Etats-Unis en Tunisie.
Même s’ils ont fait preuve de discrétion cette foi-ci, et que les photos et les vidéos ont été déconseillées aux convives « pour préserver leur image », on les a tous vu en émotion à l’occasion de la fête nationale américaine, le 4 juillet dernier. Ils étaient tous attentif et admiratif devant le Proconsul Jacob Walles, lisant son discours à la gloire de la jeune et unique « démocratie dans le monde arabe » !
La date du 20 mars 1956 n’est plus qu’un lointain souvenir et la cérémonie de l’indépendance n’attire plus autant de monde et ne provoque plus autant d’émotion. « Normal », dans un pays qui a changé de normes, de valeurs et de symboles… et où l’inégalable Bourguiba a été mis en concurrence avec l’ineffable Bouazizi.
Mezri Haddad