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Selon un Ambassadeur de France, le printemps arabe préfigurait le projet néoconservateur de Grand Moyen-Orient


16 Mars 2015

Ancien ambassadeur français en Mauritanie, au Soudan et au Zimbabwe, Michel Raimbaud vient de publier « Tempête sur le Grand Moyen-Orient », dans lequel il décortique le fameux « printemps arabe » que l’ignorance tunisienne a rendu possible et qui ne serait qu’une « appellation plutôt usurpée pour une saison sinistre n’ayant guère d’arabe, à part le nom, qu’une vague façade en carton-pâte derrière laquelle se tapissent un fanatisme islamiste de la pire espèce… ». Selon Michel Raimbaud, ce projet des néoconservateurs américains a non seulement déstabilisé le monde arabo-musulman, reconfiguré les relations internationales, mais il se manifeste désormais en Europe, avec l’activisme islamiste et son mode dissuasif : le terrorisme.


Michel Raimbaud, ancien Ambassadeur de France.
Michel Raimbaud, ancien Ambassadeur de France.
Vous avez placé en épigraphe de votre livre cette citation de Voltaire : « Pour savoir qui vous dirige vraiment, il suffit de regarder ceux que vous ne pouvez pas critiquer. » De qui parlez-vous ?

Il suffit de voir autour de soi. La maxime s’applique à ce qu’on appelle le « pouvoir profond »… On ne peut pas critiquer certaines catégories de personnes et les sujets qui vont avec, dont ceux que je traite dans ce livre. Ce sont ces sujets sensibles.

Vous dites que l’expression « printemps arabe » n’est pas un concept arabe, mais occidental. Le nouveau président tunisien l’a confirmé. Est-ce cela qui explique ce qui s’est passé dans le monde arabe ?

Tout à fait. La naissance de ce concept est le fait d’intellectuels et de journalistes français. Il se réfère aux printemps démocratiques, celui de 1848 qui a tenté de bousculer les vieilles monarchies européennes vermoulues, le printemps de Prague en 1968, Mai-68 en France… Cette assimilation historique est un peu hâtive. Sans compter qu’en Tunisie, le printemps du jasmin, c’était en hiver !

Vous n’avez pas de mots assez durs pour évoquer le printemps arabe : « Une appellation plutôt usurpée pour une saison sinistre n’ayant guère d’arabe, à part le nom, qu’une vague façade en carton-pâte derrière laquelle se tapissent un fanatisme islamiste de la pire espèce, des pompes à finances wahhabites inépuisables », etc. Et j’en passe…

Je le pense depuis le début. Tous les pays arabes ont été touchés sauf les monarchies. Le Bahreïn est une exception à cause de sa « minorité » chiite qui constitue plus de 70 % de la population. Au Yémen, on a découvert à l’occasion de la guerre civile qu’il existe une minorité chiite, les zaydites, représentant 40 % de la population. Il y a des chiites cachés en Turquie, il en existe aussi au Pakistan, entre 20 % et 25 % de la population.

Qu’entendez-vous par un Grand Moyen-Orient situé entre l’empire atlantique et l’Eurasie ? Peut-on encore parler, à propos de l’Otan, d’un empire ? Quant à l’Eurasie, elle est encore embryonnaire. N’est-ce pas une anticipation ?

Oui c’est une anticipation. L’expression du Grand Moyen-Orient elle-même est de George Bush. Ce n’est plus un Moyen-Orient dans la mesure où il va de la Méditerranée à la Chine centrale. L’Eurasie est en gestation, certes, mais le changement se produit sous nos yeux. Les Brics sont en formation, surtout son noyau euro-asiatique. Cet ensemble a de l’avenir.

Mais le Grand Moyen-Orient n’est-il pas une vue de l’esprit ? On a l’impression, plutôt, d’un monde éclaté…

C’est le monde arabo-musulman d’aujourd’hui qui est éclaté. L’expression Grand Moyen-Orient est concise et couvre une vaste région. L’empire Atlantique se place face au bloc euro-asiatique. Ces blocs existent déjà et le deuxième est en voie d’organisation.

Comment expliquer que le mal nommé « printemps » ait pu réveiller la guerre froide ? Et que la Russie et la Chine se soient liguées pour contrer ce projet ?

Cette opposition russo-chinoise est une grande première. Jusqu’en 1991, le monde est bipolaire avec, entre les deux blocs, une Chine qui trouble un peu le jeu. Au milieu se trouvent les pays non-alignés, terre de mission pour les deux camps. En 1991, à la chute de l’URSS, on a cru en l’avènement du monde multipolaire. Ce n’était pas vrai : ce que l’on a vu, c’est l’avènement du monde unipolaire, le monde américain. L’Occident va alors pouvoir gouverner au nom de la « communauté internationale », sans opposition, pendant vingt ans, jusqu’en 2011. Puis il va s’évanouir avec les crises de la Libye et de la Syrie. Tout capote avec ces pays, et nulle part ailleurs.

Avant, les Russes et les Chinois étaient tétanisés, ils étaient dans une période d’attente, hésitaient entre coopération et confrontation. Les deux pays s’abstenaient sur le Darfour, ou sur d’autres résolutions de ce type. La Chine était surtout occupée à assurer son développement et à devenir la deuxième puissance mondiale. Puis, peu à peu, Poutine réalise qu’il n’y a pas de coopération possible. Le coup d’arrêt à ses hésitations, c’est la guerre de Géorgie. L’Occident va trop loin, surtout avec le bouclier antimissiles.

La Chine va se joindre à la Russie lors de la guerre de Libye, le vrai point de rupture. Auparavant, les deux pays avaient été mis en condition pour accepter la résolution 1973, avec l’idée qu’il fallait protéger la population civile. C’est la mise en œuvre de cette résolution qui a fait déborder le vase. Ils se sont rendu compte qu’ils avaient été bernés, et qu’ils avaient fait une erreur en s’abstenant.
Les bombardements commencent le lendemain de l’adoption de la résolution des Nations unies. L’Otan, qui n’y était mentionnée nulle part, entre en guerre, bombarde tout, démolit tout. En toute illégalité. Si on regarde le chapitre 7 de la charte des Nations unies, on constate que toutes les dispositions qui encadrent les interventions ont été violées. Y compris celles au prétexte humanitaire. Pour la Chine et la Russie, il n’y aura plus jamais de résolutions à la libyenne. Elles s’opposent six mois plus tard à la résolution sur la Syrie, apposant quatre fois leur veto. Je ne comprends pas que les Occidentaux n’aient pas compris que la Russie et la Chine ne rejoindraient plus jamais la fameuse communauté internationale pour ce genre d’aventures.

La Syrie est donc fondatrice de la nouvelle donne internationale…

C’est l’épicentre d’un conflit global qui dure depuis quatre ans. Si le gouvernement légal de la Syrie était tombé comme les autres auparavant, ou si le régime avait été renversé comme celui de Kadhafi, il y aurait eu d’autres printemps arabes. Mais la Syrie en a été le coup d’arrêt. Les Russes ne voulaient pas tant soutenir la Syrie, mais ils y ont trouvé un partenaire, un point d’ancrage solide. Avant l’Ukraine… Ils ont cultivé l’alliance et rameuté les Bric autour d’eux, à commencer par la Chine. Quatre vetos sur la Syrie : la Chine garde un profil discret, mais ferme. Impressionnant. Au summum de la crise sur les armes chimiques en Syrie, en 2013, il y avait certes les gesticulations russes et américaines, mais il y avait aussi des navires de guerre chinois au large des côtes syriennes. C’est une première et cela devrait faire réfléchir les Occidentaux.

Pourquoi l’Occident séculier soutient-il des mouvements islamistes qu’il combat chez lui ?

Par absence de logique. À ce propos, il faut distinguer les États-Unis et ses alliés au Conseil de sécurité, qui ont des traditions de grandes puissances, et les alliés privilégiés des États-Unis, mais qui n’ont pas les mêmes motivations. Globalement, les Américains sont ceux qui commandent et ont mis en œuvre une stratégie du chaos. Ils ont continué à soutenir les gens d’Al-Qaïda, dont ils sont les créateurs avec l’Arabie Saoudite et le Pakistan. Puis, quand ils n’en ont plus eu besoin, ils les ont laissé tomber en leur disant « débrouillez-vous ». Mais toute cette affaire s’est retournée contre eux avec les attentats du 11-Septembre.

Les mouvements terroristes internationaux, comme ceux qui sévissent en Syrie et ailleurs dans le Moyen-Orient ou le monde musulman, sont des héritiers d’Al-Qaïda. Les États-Unis n’ont pas de raison de ne pas s’en servir, tout en sachant que ce n’est pas leur modèle social. Ils les utilisent puis, quand ils ne s’en servent plus, ils les bombardent.

Je ne crois pas que les États-Unis aient une sympathie particulière pour les mouvements islamistes, ni pour les Arabes d’ailleurs – cela se saurait. Mais ils peuvent s’accommoder de tout. Leurs meilleurs alliés sont des gouvernements islamistes. Ils ont du mal à trouver des alliés progressistes : ils n’en ont jamais eu dans l’Histoire.

Vous étiez en poste en Arabie Saoudite, où l’on vient d’assister à une scène de succession moyenâgeuse. Tous les chefs d’État occidentaux s’y sont rués pour prêter allégeance au nouveau roi d’Arabie. Qu’est-ce qui les fait vraiment courir, à part le brut ?

Le pétrole et les intérêts d’Israël. Dans tout le monde arabe, il existe un terreau favorable à la contestation, mais on n’a pas le droit d’y intervenir et de bombarder sous prétexte que les peuples sont menacés par des tyrans. D’autant qu’on se rend compte que ce type d’opération est menée pour changer le régime ou détruire le pays. Il est plus facile d’exploiter le pétrole avec des pays fragilisés.

Le pétrole détourné d’Irak et de Syrie va notamment vers Israël, sans besoin d’oléoducs. Vendu en contrebande à 15 dollars le baril lorsque celui-ci était à 120 dollars, ce pétrole a rapporté des revenus conséquents : 5 milliards de dollars. Des sommes qu’on ne transporte pas dans des matelas ! Il faut des banques, des complices pour les mettre sur le marché. Les circuits parallèles fonctionnent.

Des documents secrets du Pentagone à propos de la Libye viennent de donner une autre explication à cette guerre. Hillary Clinton, conseillée par les Frères musulmans, aurait caché à Obama que Kadhafi était en négociation avec le Pentagone pour passer la main, et que l’histoire du génocide menaçant les habitants de Benghazi était inventée de toutes pièces. L’Occident joue-t-il contre son propre camp ?

Il existe tellement de machinations qu’on finit par se prendre les pieds dans le tapis. Il y a toujours des histoires des services spéciaux, etc. Les renseignements sont pipés. Les services jouent un grand rôle là-dedans. Cela dit, Hillary Clinton n’est pas la finesse même sur la Libye, la façon dont elle rit à l’annonce de la mort de Kadhafi le prouve. Un ambassadeur américain a été tué de la même façon que lui pourtant.

Pourquoi la Syrie a-t-elle été jusqu’ici l’exception, et comment analyser l’émergence de l’État islamique ?

J’espère que la Syrie restera l’exception, du moins dans ce contexte-là. L’affaire est loin d’être terminée, mais il y a plusieurs raisons. Bachar al-Assad, quoi qu’on en dise, a une légitimité, il est populaire chez la majorité de ceux qui vivent en Syrie. Quels que soient les défauts de son régime, il est perçu dans le contexte actuel comme un rempart contre le démantèlement du pays. Il a des alliés chiites comme le Hezbollah, l’Iran, certainement une vieille alliance qui date du temps du shah. Il a un véritable partenariat avec la Russie : la Russie défend la Syrie, mais la Syrie défend aussi la Russie. Si la Syrie devait subir le sort des autres pays, la Russie le sentirait passer. Et son prestige international s’en ressentirait.

Quel est le jeu d’Israël ? Vous étiez ambassadeur au Soudan. Quel regard jetez-vous sur ce pays éclaté ?

Israël est derrière toutes les crises du monde arabe, toujours à l’affût. La sécession du Sud-Soudan est un triomphe de la diplomatie américaine et de la diplomatie israélienne. Il fallait transformer le Sud-Soudan en base israélienne, pour le complot contre ce qui reste du Soudan. Ils veulent affaiblissement de ce pays non pas parce qu’ils sont islamistes, mais parce qu’ils ont soutenu Saddam. Ils ne veulent pas la peau de Tourabi ou Al-Bachir, ils veulent couper le Soudan en morceaux. Ils ont réussi, et cela continue avec le Darfour.

Mais le nouvel État, le Soudan du Sud, n’est pas brillant…

Mais lequel des régimes nés des « printemps arabe » est-il brillant ? L’industrie de production de la démocratie américaine au nouveau Grand Moyen-Orient est un trompe-l’œil qui vient des années 1980-1990. Cela n’a rien à voir avec la démocratie et les droits de l’homme : cette stratégie sert à casser le monde arabo-musulman, comme cela est attesté dans de nombreux documents. Car les Américains font ce qu’ils disent, et disent ce qu’ils font.

Il y a un plan, ce n’est pas de la conspiration. Quels que soient les avatars pour soutenir tel ou tel camp, les options restent ouvertes. Au Bahreïn par exemple, ils soutiennent à la fois la rébellion, ce qui leur permet de dire qu’ils défendent les droits de l’homme et la démocratie, et la monarchie pro-saoudite sunnite. Et ils sont gagnants de toute façon. Ils ont fait la même chose au Yémen, et en Égypte, même chose : d’abord Moubarak, puis les islamistes, puis Morsi et maintenant Sissi. Ce n’est pas logique, c’est la logique du chaos. Et elle est bel et bien là.

Comment expliquer que le savoir-faire français sur le Moyen-Orient s’avère inopérant ? Il y avait une certaine politique arabe de la France qui est aujourd’hui introuvable. La diplomatie française est-elle victime de myopie ou d’une certaine posture idéologique ?

De Gaulle était un grand homme je pense. Il avait bien une politique arabe exemplaire, il a renversé le cours des relations franco-arabes après l’indépendance de l’Algérie et réussi à changer d’alliance après la guerre des Six-Jours. Après les néfastes conséquences de l’expédition de Suez, c’était un exploit. Une politique arabe a persisté dans une espèce de consensus politique en France. Puis, après le coup d’honneur sur l’Irak, en 2003, la France a commencé à rentrer dans le bercail occidental. Fini la récréation. Le bilan est désastreux.

Elle a pourtant un savoir-faire et avait une grande tradition diplomatique. C’est un grand pays, pas dans le sens d’un pays braillard qui manigance à tout prix… Un grand pays au sens positif du terme. Son retrait peut peut-être changer, mais je ne vois pas venir le changement maintenant.

Hollande continue de dire que l’État islamique et le régime de Bachar, c’est blanc bonnet et bonnet blanc, deux ennemis à combattre…

Depuis quatre ans, on continue de dire le pire sur Bachar, qu’il va tomber d’une minute à l’autre… En réalité, ce sont les Américains qui peuvent changer d’avis et sont en train de le faire.

Les alliés privilégiés de la France sont le Qatar, la Turquie et l’Arabie Saoudite. On a vu défiler les six monarques du Golfe à Paris, nos alliés. On soutient à la fois les terroristes modérés et les djihadistes démocratiques. C’est une position difficilement tenable, de la haute acrobatie. Les Américains, eux ne l’ont pas fait en même temps : d’abord alliés d’Al-Qaïda, puis leurs ennemis. Ils changent d’avis sans se gêner.

Fabius a dit qu’Al-Nosra, classée par les Américains comme organisation terroriste, fait du bon boulot en Syrie…

Tous les éléments spécialisés de la diplomatie française ont été dispersés ; les spécialistes de l’Orient, les arabisants ont été envoyés en Afrique du Sud ou ailleurs, avec la volonté de les remplacer par des technocrates. Résultat, les nouveaux diplomates n’ont pas la même carrure, produisent des rapports nuls, n’ont pas d’analyse sérieuse…

Les ambassadeurs français en Syrie et en Libye avaient pourtant alerté le gouvernement en le mettant en garde contre tout aventurisme.

Oui, mais celui de Syrie s’est ensuite fait taper sur les doigts et a fini par accepter de s’aligner sur la politique officielle.

Pensez-vous qu’on peut revenir à la diplomatie de l’après-Suez ? L’Occident est-il en train de comprendre ses erreurs et de changer ?

Le retour de De Gaulle au pouvoir a brisé un consensus, quand le gouvernement tripartite français, qui a duré douze ans, faisait que la France ne bougeait pas le petit doigt sans en référer à Washington. Cela inclut la période de Suez. Le plan Marshall avait un coût pour l’indépendance nationale française. Et l’Union européenne – conçue par les Américains plus que par les Européens eux-mêmes – a contribué à peser en ce sens. Toute l’histoire de l’atlantisme, l’idée de faire de l’Otan l’armée de l’Europe, n’est pas la conception française de l’Europe.

L’État islamique est-il une création indirecte de l’Occident ?

Il est le résultat de l’invasion américaine de l’Irak. On peut dire cela à tous les coups. Les Américains ont cassé toutes les institutions irakiennes (armée, police, gouvernement, parti baath, etc.) et facilité la prise de pouvoir par les chiites et des Kurdes au détriment des sunnites. Quand les officiers baathistes ont été mis en prison où séjournaient déjà les islamistes, les deux groupes ont fait connaissance. La prison a été le centre d’étude et de fusion entre des gens qui ne se seraient pas rencontrés autrement – comme cela arrive ailleurs.

L’État islamique aurait profité de la zone d’exclusion aérienne imposée depuis 1991. C’est là que Zarkawi et ses hommes se seraient développés.

En effet, c’est là qu’ils se sont développés. Il n’y avait plus d’État irakien et la porte était ouverte à toutes les aventures. Ce qui a favorisé les événements de juin 2013 ? Une conjonction d’islamistes et d’officiers du Baath irakien, désireux de revanche, pourchassés tous deux par les Américains. Ils ont décidé d’unir leur destin pour des objectifs différents. Peut-être pas pour le long terme.

L’Occident semble préférer le chaos aux États souverainistes…

C’est ce qui apparaît. Le chaos, c’est le but des néoconservateurs qui ont une vieille théorie : il fallait maîtriser toute la zone qui ceinturait le monde communiste soviétique et chinois, et d’autre part sécuriser les intérêts occidentaux. Les Américains se sont aperçus que cette zone était entièrement constituée de pays musulmans. C’est la ceinture verte musulmane, ce qui est devenu le Grand Moyen-Orient de Bush, gonflé au fil des pulsions américaines. Il y avait deux catégories de pays dans cette zone : les États forts, comme l’Iran du shah, ou la Turquie entrée dans l’Otan, peut être aussi l’Irak, des régimes amis de l’Occident. Et les autres qu’il fallait affaiblir, où il fallait provoquer des changements de régime, renverser les pouvoirs en place.

Puis des États ont viré de bord, comme l’Iran avec la révolution islamique. Quand la configuration est défavorable, on essaie de changer le régime, et si on n’y arrive pas, on casse l’État – en particulier les armées du monde arabe –, on ruine le pays. Cette stratégie figure dans beaucoup de documents américains ou israéliens. Ça s’est produit avec les armées égyptienne, irakienne, syrienne et sans doute algérienne.

Mais le chaos est contagieux et peut toucher les monarchies du Golfe. Celles-ci seraient-elles les grandes perdantes face à l’axe chiite ?

Dans l’esprit de certains dirigeants américains, c’est ce qui va arriver. Un ancien directeur de la CIA a dit qu’il fallait s’occuper des pays comme la Syrie et l’Égypte, déstabiliser huit pays… L’idée, c’est de leur « préparer » un islam qui leur convienne et d’aider les musulmans à accéder au pouvoir. Quand ces pays auront bien été déstabilisés, alors on pourra s’occuper de l’Arabie Saoudite. Le pacte de Quincy signé en 1945 a été renouvelé en 2005 pour soixante ans, mais il ne durera pas.

Les États-Unis n’ont pas aidé le shah à se maintenir au pouvoir. Il n’était plus fréquentable, il a été renversé. Résultat, l’ayatollah Khomeiny a aussitôt pris le pouvoir, et l’Iran est devenu un des ennemis publics numéro un de l’Amérique. Jusqu’en 1979, ce pays était pourtant l’allié stratégique, y compris l’allié nucléaire. Il existait une vraie coopération entre l’Iran et les États-Unis dans ce domaine, avec un traité, des laboratoires, etc.

La question nucléaire a été mise à l’ordre du jour en 2002. Après que l’Iran eut le temps de s’occuper de l’Irak… Avant on n’en parlait pas. Puis les Européens, avec des Américains qui en arrière-plan soutenaient la démarche, se sont benoîtement rappelés du traité de non-prolifération…

On est au cœur d’une nouvelle guerre froide avec l’Ukraine. Jusqu’où ce conflit va-t-il reconfigurer le nouvel ordre mondial en gestation ? Quels sont les effets sur le Grand Moyen-Orient ?

En France, on fait rarement un lien entre les différents problèmes, on a tendance à les saucissonner. Cela empêche une compréhension de la situation. J’ai peu entendu les gens établir un rapport entre la crise syrienne et la crise ukrainienne. Pourtant, il est évident. Il n’y aurait pas eu de relance de la crise ukrainienne s’il n’y avait pas eu la crise syrienne. Autrement dit, si la Russie avait laissé tomber Bachar, il n’y aurait pas eu une crise ukrainienne à ce niveau de gravité. On s’en serait accommodés. On a fait la surenchère surtout pour enquiquiner la Russie.

Sans la crise ukrainienne, les Brics auraient-ils pris la même importance sur la scène internationale ?

Sans la crise syrienne il faut dire. Car la crise ukrainienne est un développement de la guerre en Syrie. La guerre d’Ukraine s’inscrit dans le grand mouvement qui a déclenché les printemps arabes. En même temps qu’on essaie de contrôler des pays arabes musulmans et d’étendre petit à petit la zone de crise, on tente de casser ce qu’était l’URSS, réduite à la Russie. On veut contrôler la zone d’influence russe et la réduire au strict minimum. La Yougoslavie, en tant que pays communiste indépendant, était la partie la plus exposée ; elle sera dépecée.

Pour permettre l’intégration de toute l’Allemagne réunifiée dans l’Otan, le chancelier Kohl et Bush avaient promis à Gorbatchev que l’élargissement de l’Otan s’arrêtait là. Gorbatchev a reconnu avoir été berné. Cela a sonné la fin de la stabilité internationale. Le pacte de Varsovie a vécu, d’anciens États adhèrent à l’Union européenne et passent à l’Otan. Avec l’entrée des pays baltes dans cette organisation, la Russie est encerclée. Mais c’est la Géorgie qui a été la ligne rouge, puis l’Ukraine. La Géorgie a été le symbole du tournant de Poutine, qui avait au début décidé de collaborer avec les Occidentaux.

Les États-Unis admettent avoir contribué au renversement du régime de Kiev…

Les Européens ne sont pas très exigeants sur la légalité internationale. Peu avant que Ianoukovitch ne parte, la France, l’Allemagne, la Pologne… accouraient à Kiev pour signer un accord sur des élections anticipées entre le gouvernement, l’opposition et la Russie. Puis il y a le coup d’État et personne n’a protesté.

Il y a eu une révolution Orange en 2004-2005 en Ukraine, avant la Géorgie, puis les printemps arabes sont arrivés. C’est le rêve américain qui s’est réalisé. Mais après la crise syrienne, Obama a été vexé : on lui avait évité une guerre inutile et dangereuse, chef-d’œuvre diplomatique des Russes, et il était mis en embarras. Le président américain avait une revanche à prendre. En 2013, quand il a vu que la Russie avançait trop, notamment en Syrie, il s’en est pris à l’Ukraine. À partir de ce moment, fini la concertation entre les États-Unis et la Russie sur la Syrie. Washington n’a plus laissé Moscou tenter de régler le problème.

Sauf dernièrement…

La Russie est revenue au premier plan. Même si je doute que les 100 000 assistants ou coopérants russes présents au début de la guerre en Syrie y soient tous encore. En fait Obama, n’est pas si va-t-en-guerre que cela. Il voudrait une solution d’un autre type, car ce qui se passe en parallèle de la guerre d’Ukraine est dangereux. Du temps des menaces de frappes américaines sur la Syrie, des armes chimiques, Obama a été menacé par une procédure d’impeachment. Sans compter les incertitudes sur les frappes américaines : lors d’un tir américain de deux missiles sur les côtes syriennes, par exemple, l’antiaérienne syrienne a réagi, l’un des missiles a été détruit et l’autre détourné. Et puis la guerre est impopulaire aux États-Unis. Cela dit, l’Ukraine est un chef-d’œuvre d’intox. On vole et on crie au voleur.

L’avenir du projet du Grand Moyen-Orient ?

Le projet démocratique certainement, même si, à mon avis, il n’y aura pas de démocratie ni printemps arabes. Le projet de domination reste, même s’il ne va pas forcément se réaliser. L’enjeu est toujours là pour les Américains. La ceinture verte est toujours utile pour encercler le postcommunisme. Même si la Chine est un régime aménagé, il est prudent de le « contenir » en quelque sorte. Les Occidentaux parlent toujours d’une opposition modérée en Syrie, je ne sais pas où ils la voient, mais c’est leur discours. Ils arment une opposition qui est en fait celle des djihadistes… L’alliance qui s’est forgée progressivement entre la Turquie, l’Arabie Saoudite et les Occidentaux, notamment États-Unis, France, Angleterre, alliance de circonstance s’il en est, résiste encore.

La Syrie peut-elle reprendre son autorité sur l’ensemble du territoire ?

Si on la laisse faire, je pense que oui. Le discours sur la démocratie est de moins en moins crédible. On n’a pas à intervenir dans les pays, même pas en Arabie Saoudite qui doit évoluer toute seule.

Le problème est que l’Arabie Saoudite exporte son idéologie, qu’elle en a une vision universaliste…

Elle exporte son idéologie pour éviter d’être attaquée à son tour. Mais celui qui a une vision universaliste, c’est Erdogan. Les projets qu’il concoctait avant le printemps arabe étaient différents. Il était proche de la Syrie et de la Libye. Maintenant, il est le soutien des Frères musulmans. Il reçoit les visiteurs étrangers dans le palais du Sultan avec une garde d’honneur de vingt-huit soldats représentant les vingt-huit provinces ottomanes. Ce gouvernement islamiste est nostalgique.

Interview menée par Majed Nehmé, Augusta Conchiglia et Hassen Zenati, publiée dans Afrique-Asie du 3 mars 2015.

Michel Raimbaud, « Tempête sur le Grand Moyen-Orient », éd. Ellipses, 2015.


           


1.Posté par Léon le 17/03/2015 07:38
Chers amis T.S-istes et internautes,
L'urgence quant à l'arrêt du foot dans notre pays est nécessaire. Comme je l'ai répété mille fois sur les ligne de ce journal patriote et souverainiste, c'est une mesure de salubrité publique chez des gueux, sue l'on peut qualifier de tous les noms si l'on évite toutefois deux qualificatifs "bonne foi" et "fairplay".
Je vous ai répété mille fois que la seule et unique chose qui motivait la rue lors des tristes évènements qui allaient mener la Tunisie vers une nouvelle ère coloniale était la haine et la jalousie créées par le foot dans les milieux footeux et qui allait déboucher sur le fait le plus grave: Séparer le pays en nourrissant le régionalisme.
J'avais maintes fois subi les insultes de prétendus intellectuels sur lin journal concurrent (BN pour ne pas le citer) lorsque j'avançais ce type d'argument, souillant, à leur dires, la noblesse (sic) des revendications révolutionnaires, noblesse qui allait montrer sa réalité, au sein d'une peuplade, d'une horde, d'une poussière d'individus qui n'ont eu de cesse de se bouffer le nez depuis quatre années, portant le pays qu'ils disent tous aimer (menteurs!) vers une colonisation certaine. Ils détestent leur pays tout en disant l'aimer. Cela ne trompe personne.
Parmi ces personnes qui attaquaient mes arguments footballistiques, il est un certain "Abel Chater" de son pseudo BN-iste, mû de haine et de régionalisme, défenseur des islamistes au pouvoir, ennemi avéré de Bourguiba, et bizarrement....., appelant à faire payer un tribu à la région du Sahel (en voilà encore un qui aime son pays). Il trouvait que mes arguments était utopiques et que le foot n'a rien à voir avec la révolution.
Dans un article récent concernant le retrait de l'ESS du championnat de la Tunisie occupée, publié par business news le 06/03/2015 à 21:03 et intitulé "L’ESS ne jouera pas contre le C.S.H-Lif, annonce Ridha Charfeddine", notre cher compatriote, aucunement patriote s'est permis l'intervention suivante qui allait le "découvrir", qui se prétendait au dessus de ces histoire de foot, et qu'il fini par une chanson de virage concernant les sahéliens, qu'il savoure apparemment, où il s'est permis de glisser d'un "embrasser-lui son père" chantée avec un autre terme par des gueux en coeur dans un pays où sous le couvert des "stades" on peut tout se permettre. Il a dû en mettre davantage, puisque la fin de son article a été censuré comme vous le verrez ci-dessous.
J'avais eu une réponse virulente, mais malheureusement BN a préféré me la censurer (ils ont peut-être raison).
Je vous laisse donc lire et vous délecter de la lecture de cet Abel Chater sans vous en dire plus, Abel se disant juste, intellectuel et dépourvu de sentiments régionalistes, mieux encore, Abel disant que le foot n'est aucunement ce qui motivait ces pulsions révolutionnaires comme vous le constaterez dans ce qui suit:

Début de commentaire:
Titre: Le premier but de Ben Chouikha, c'est le premier but qui a inauguré le stade de Rades
Commentaire de: Abel Chater, le 06-03-2015 22:05
L'Etoile Sportive du Sahel en finale de la Coupe de Tunisie contre le Club Sportif d'Hammam-Lif. Le premier match d'inauguration du stade de Rades. Les billets introuvables. Abdelmajid Chettali garantit avec certitude la victoire des Swahliyas. Un des directeurs de la police me procure deux billets, pour moi et pour mon fils, pas trop loin de la tribune présidentielle. Les Swahliyas à ma gauche, les Hammam-Lifois à ma droite.
Mammam-Lifois, disais-je ?
Non, toute la capitale et ses banlieues à ma droite, jusqu'en face juxtaposant le virage des Swahliyas à ma gauche.
David contre Goliath. Tout est à l'avantage de l'Etoile Sportive du Sahel, même quelques décisions de l'arbitre le préconisent.
Ben Chouikha tire une roquette avec son pied droit.
But, goal, Tor, la Hamhama mène un but à zéro. Les Swahliyas s'acharnent, mais en vain. Leurs apporteurs quittent le stade de Rades tout un quart d'heure avant la fin du match. Le visage du dictateur déchu Ben Ali, jaune comme un citron. La Hamhama gagne la coupe de Tunisie et gagne le premier match d'inauguration du stade de Rades et marque le premier but dans ce merveilleux stade.
Maintenant, les Swahliyas ont peur de se faire ridiculiser de nouveau devant le Club Sportif d'Hammam-Lif. Ils se désistent pour je ne sais quoi, mais en vérité, ils ont la trouille devant la Hamhama.
***?
Fin de commentaire

Voilà ce que sont les intellos de notre pays. Prenez garde au foot, je vous le dis et vous le redis, la Tunisie est un virage de foot, et ils ne se réveilleront de leur léthargie que le jour où ce dernier sera purement et simplement occis du quotidien tunisien.
Léon.
VERSET 112 de la SOURATE des ABEILLES.

2.Posté par UN ALGÉRIEN. le 20/03/2015 13:45
LÀ OÙ LES USA ET VALETS EUROPEENS ONT VOULU MODIFIER LES ETATS , DESTABILISATION DES PAYS MUSULMANS AVEC L'AIDE DE PAYS TRAITRES , LA NATURE REPRENDRA CES DROITS NATURELS .. LES USA ET LEURS VALETS EUROPÉEN ET DU GOLF , TURQUIE SE SONT PRIS UNE CLAQUE EN IRAK ET SYRIE . .L'ALGERIE COMBATTERA A MORT ET VAINCRA QUICONQUE L'APROCHE , LA TUNISIE , LA LIBYE SONT PROTÉGÉ PAR L'ALGERIE .... L'EGYPTE DE SISSI A DONNÉ UNE CLAQUE ET A ÉTÉ LE GRAIN DE SABLE QUI A ENRAYÉ LE PRINTEMPS USA ET FRERES TRAITRES MUSULMANS . . CE QUI EST A CRAINDRE C'EST CE QUI RESTE DES ETATS EUROPÉENS , DISLOQUÉ , SOUS INFLUENCE USA ET SIONISTE , MARIENT LES HOMME ENTRE EUX , DETTES , CHOMAGES , VALEURS ...QUE RESTE -IL DE L' EUROPE ? POUR LES PAYS MUSULMANS L'ISLAM TRADITIONEL REPEND CES DROITS , LE WAHABISME A MONTRÉ SON VISAGE HIDEUX , LE DANGER TIRE A SA FIN . . LE VRAIS DANGER EST AUX USA , ISRAËL ET EUROPE QUI SONT GANGRENÉ PAR LE FAUX , LE MENSONGE , L'HYPOCRISIE ,VULGARITÉ , L'USURE , ILS MARIENT LES HOMMES ENTRE EUX !!!! ILS S ' AUTO DETRUISENT DE L'INTERIEUR , SEULE L'APPARENCE EST SAUF , COMME UNE POMME DONT LE VER LA RONGE DE L'INTERIEUR . C'EST RÉELLEMENT LA SITUATION . . LES USA ET ISRAËL SONT CRIMINELS ET N'ECHAPPERONS PAS A LEUR DESTIN CELUI DE SE DISLOQUER . L'ISLAM VERIDIQUE EST INATTAQUABLE . . LES PAYS MUSULMANS TRAVERSENT UNE TEMPETE , MAIS LES PAYS OCCIDENTAUX TRAVERSENT UN SEISME MORALE , SOCIALE , LES HOMMES SE MARIENT ENTRE EUX , LES FEMMES ENTRE ELLES , À LA MAIRIE ! SYNONYME DE PERDITION , ÉGAREMENT QUI EST UNE FORME DE FIN , DE SEISME ....COMME LE PEUPLE DE LOT , SEMBLABLES A DES SINGES SANS PUDEURS , QUELLE HORRIBLE SEISME ? LES USA ISRAEL EUROPE SONT AVEUGLES ET CE SONT EUX LES VICTIMES .

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